Chaque automne, la couleur rose s’invite partout : les façades s’illuminent, les rubans ornent les affiches, les réseaux sociaux se parent de slogans solidaires.
Mais derrière ces rubans, il y a des femmes qui hésitent, qui ont peur, ou qui n’ont pas accès aux soins. Et des gestes qu’on remet parfois à plus tard, faute de temps pour soi.
Il y a aussi un constat qui ne change pas : une femme sur huit sera touchée par un cancer du sein au cours de sa vie, et plus de 12 000 en meurent encore chaque année.
Et derrière ces chiffres, il y a une urgence silencieuse : celle de la prévention, de la sensibilisation, de la détection précoce.
Sensibiliser, ce n’est pas qu’une campagne médiatique annuelle de plus.
C’est aussi un travail de fond et de terrain, souvent invisible, porté par des soignants qui accompagnent sans relâche.
Sensibiliser, c’est aller au-delà du symbole. C’est tendre la main, rappeler qu’un dépistage précoce change tout — un traitement plus léger, une qualité de vie préservée, une chance de guérison réelle.
Et dans cette mission de santé publique, la sage-femme joue un rôle essentiel : informer, écouter, rassurer, orienter. Au plus près du quotidien.
Et c’est ce que nous verrons ensemble.
| Rôle pivot des sages-femmes : Les sages-femmes sont des maillons essentiels de la santé féminine. En prévention primaire, elles sensibilisent aux facteurs de risque modifiables : alcool, tabac, sédentarité, surpoids, alimentation déséquilibrée, exposition hormonale prolongée. Elles encouragent à adopter un mode de vie sain. En prévention secondaire, elles repèrent les anomalies, orientent vers le dépistage organisé et expliquent son intérêt. Leur approche bienveillante aide à lever les freins : peur de la douleur ou du résultat, idées reçues. Elles rappellent aussi que la mammographie, rapide et prise en charge à 100 % entre 50 et 74 ans, sauve chaque année des milliers de vies. Enfin, elles jouent un rôle de liaison entre la femme, son médecin, son radiologue, son gynécologue, et les structures de dépistage comme le CRCDC. |
Pourquoi la sensibilisation est cruciale ?
Impact du cancer du sein en France
Avec plus de 61 000 nouveaux cas chaque année, le cancer du sein reste le cancer le plus fréquent chez la femme.
Le dépistage précoce permet aujourd’hui une survie nette à 5 ans de 88 %, des traitements moins agressifs, moins mutilants, et une meilleure qualité de vie.
Aujourd’hui, 60 % des cancers du sein sont détectés à un stade précoce, ce qui permet d’éviter les formes plus graves et de réduire la mortalité.
Pourtant, plus de la moitié des femmes concernées ne participent pas au dépistage organisé. Un constat qui souligne l’importance du rôle éducatif des soignants.
Freins à la détection précoce
Les obstacles au dépistage sont nombreux : peur de l’examen, angoisse du verdict, appréhension liée à la douleur ou aux rayons, manque d’information fiable, inégalités d’accès dans les zones rurales et précaires.
Les fausses croyances continuent de circuler, et certaines femmes n’osent pas consulter.
C’est là que les sages-femmes, infirmiers et kinésithérapeutes interviennent : par leur proximité, ils réhumanisent la prévention, la rendent concrète, accessible et rassurante.
Objectifs de la sensibilisation
- Informer sans alarmer.
- Encourager la vigilance et l’autosurveillance.
- Normaliser la parole autour du corps et de la santé féminine.
Ces trois axes structurent les campagnes nationales et les actions locales.
Sensibiliser, c’est donner des repères, expliquer sans juger, et redonner confiance aux femmes dans leur capacité à agir pour leur santé.
| Messages clés pour consultation Certaines phrases, simples et apaisantes, peuvent tout changer : « Le dépistage sauve des vies. » « La mammographie est rapide, indolore pour la majorité, et gratuite entre 50 et 74 ans. » « Tous les corps et tous les âges méritent d’être informés. » N’hésitez pas à les reformuler à votre manière : ce sont souvent les mots justes qui lèvent les dernières hésitations. |
Octobre Rose : la campagne nationale phare

Origines et objectifs
Née aux États-Unis dans les années 1980 et relayée en France depuis 1994, la campagne Octobre Rose a pour mission d’informer, de sensibiliser et de mobiliser autour du dépistage du cancer du sein.
Mais au-delà du mois d’octobre, c’est une dynamique qui se prolonge toute l’année : dans les cabinets, les maternités, les collectivités, les entreprises. Parce qu’Octobre Rose, c’est aussi un symbole d’unité : chaque ruban, chaque action, rappelle que la prévention est l’affaire de tous.
Actions emblématiques
Les initiatives pour sensibiliser au dépistage sont nombreuses :
- Illuminations de monuments comme la Tour Eiffel.
- Consultations gratuites ou journées de dépistage mobile.
- Ateliers santé et campagnes d’informations locales.
- Marches solidaires, défis sportifs…
- Témoignages de patientes, et gestes de soutien (dons, personnalités qui se rasent la tête…).
Ces actions donnent un visage humain à la prévention et rappellent l’importance de la détection précoce.
Impact et limites
L’impact médiatique d’Octobre Rose est indéniable. Mais le véritable enjeu est la continuité de la sensibilisation au-delà de ce mois symbolique.
Chaque femme doit être informée toute l’année, dans un cadre de confiance et de proximité.
Rappelons aussi que le dépistage organisé est entièrement gratuit et fiabilisé grâce à la double lecture systématique des clichés — une sécurité supplémentaire souvent méconnue.
Prévention primaire vs secondaire vs tertiaire : rôle des sages-femmes :
| Prévention primaire | Prévention secondaire | Prévention tertiaire |
| Éducation à la santé, réduction des facteurs de risque (tabac, alcool, sédentarité, surpoids, contraception hormonale prolongée). | Repérage précoce. Examen clinique régulier des seins. Orientation vers le dépistage organisé ou individualisé selon le profil. Orientation vers les consultations spécialisées pour les femmes à haut risque. | Suivi post-cancer. Accompagnement psychologique et corporel. Prévention des récidives. Coordination du parcours de soins. |
Outils et actions concrètes pour sensibiliser
En consultation sage-femme
Chaque consultation gynécologique est une occasion d’aborder la santé mammaire.
L’examen clinique annuel des seins, recommandé dès l’âge de 25 ans, permet d’éduquer à l’autosurveillance, et d’évoquer le dépistage sans tabou ni culpabilité.
Mais si l’autoexamen mammaire est conseillé pour déceler les modifications, il ne remplace pas la mammographie.
Vous pouvez aussi proposer des brochures, affiches ou supports numériques. Même si votre patiente n’est pas prête, elle aura reçu une information fiable qu’elle pourra relire plus tard.
Les témoignages de patientes ou les sources validées sur les réseaux sociaux sont aussi de précieux leviers pour dédramatiser la mammographie et encourager la vigilance.
Ne les négligez pas. Chaque outil utilisé est un pas de plus vers le dépistage.
En entreprise ou collectivités
Les actions collectives multiplient l’impact : campagnes internes, consultations ponctuelles, ateliers santé, dépistages mobiles dans les zones sous-dotées, conférences ou événements solidaires.
Les collectivités locales et les entreprises sont des relais puissants pour diffuser les messages de prévention et réduire les inégalités d’accès.
Toute initiative est bonne à mettre en place pour sensibiliser au dépistage et abaisser la mortalité liée au cancer du sein.
À l’échelle individuelle
La sensibilisation passe aussi par les petits gestes du quotidien :
- Partager une information fiable.
- Recommander une bonne pratique sur les réseaux sociaux.
- Rappeler à une amie de prendre rendez-vous.
- Participer à un événement caritatif ou solidaire.
Chaque initiative compte, car la prévention se construit ensemble.
FAQ :
À quel âge commencer la sensibilisation ?
→ Dès l’adolescence, avec des messages adaptés à l’âge et non anxiogènes.
L’autosurveillance remplace-t-elle la mammographie ?
→ Non, elle complète le dépistage : elle permet de repérer un changement, et d’en parler à un professionnel.
Que dire aux patientes réticentes ?
→ Expliquer simplement le déroulement de l’examen, sa courte durée, ses bénéfices, ses limites, et la double lecture.
Comment orienter vers le dépistage ?
→ En proposant un rendez-vous avec une sage-femme, un CRCDC ou une équipe d’oncogénétique selon le risque.
Peut-on utiliser les réseaux sociaux ?
→ Oui, comme vecteur d’information et de motivation, en s’appuyant sur des sources fiables validées par les institutions de santé.
Messages clés à faire passer aux patientes
Les principaux messages à délivrer à vos patientes sont :
- Le dépistage sauve des vies.
- La mammographie est rapide, gratuite pour les 50-74 ans et doublement lue.
- Tous les corps et tous les âges méritent une information claire.
- Le cancer du sein n’est pas une fatalité, c’est un combat collectif.
| Mini-arbre décisionnel – Femmes âgées de 50 à 74 ans avec risque moyen → dépistage organisé (mammographie tous les 2 ans). – Femmes de < 50 ans sans facteur de risque → prévention primaire, examen clinique, orientation si symptôme. – En présence d’un haut risque → IRM et mammographie annuelle, orientation oncogénétique. – En cas de suspicion clinique → parcours diagnostic complet (imagerie + biopsie), hors dépistage. |
Pour conclure…
Sensibiliser, ce n’est pas qu’une campagne annuelle, un ruban rose, des brochures ou des statistiques. C’est une responsabilité partagée et continue.
C’est écouter, expliquer, rassurer. C’est redonner du sens au mot prévention et replacer la femme au cœur du soin.
Chaque mot posé, chaque geste de bienveillance, chaque encouragement au dépistage peut sauver une vie.
Et, la sage-femme, par sa proximité et son écoute, joue un rôle clé pour que plus aucune femme ne renonce à se faire dépister.
Alors, si vous souhaitez vous aussi vous impliquer dans les campagnes de sensibilisation, n’hésitez pas à participer aux actions Octobre Rose près de chez vous et à encourager vos patientes âgées de 50 à 74 ans à participer au dépistage organisé.
Vous souhaitez aller plus loin ? Découvrez notre module DPC dédié : « Dépistage et diagnostic du cancer du sein par la sage-femme », pour approfondir vos connaissances, actualiser vos pratiques et renforcer votre rôle dans la prévention.
Source :
La ligue contre le cancer du sein : Octobre rose